VAYÉHI
Nous allons lire cette semaine la dernière Paracha du Séfer Béréchit, Yaakov Avinou, arrivé à la fin de sa vie, bénit ses fils.
Au sujet de la bénédiction concernant Zévouloun et Yissahar, Rachi explique (Béréshit 49 ; 13) qu’ils étaient associés, Zévouloun faisait du commerce maritime et subvenait aux besoins d’Yissahar qui, lui, se consacrait à l’étude de la Torah.
Yaakov bénit en premier Zévouloun et ensuite Yissahar, c’est-à-dire qu’il a béni d’abord celui qui travaille et ensuite celui qui étudie.
Pourquoi ? C’est vrai qu’ils sont associés, mais l’étude de la Tora n’est-elle pas prioritaire ?
Plus tard, Moché Rabbénou (Dévarim 33 ; 18) reprendra cette bénédiction en ces termes : « Réjouis-toi Zévouloun dans ta sortie et Yissahar dans tes tentes »
C’est-à-dire que Zévouloun sort faire du commerce et Yissahar s’occupe de la Tora dans les tentes (la tente représentant ici le lieu d’étude, le Beith Hamidrash).
Là encore Zévouloun est béni avant Yissahar car ils avaient formé une association, Zévouloun sortait pour faire du commerce, il s’enrichissait et donnait à manger aux enfants d’Yissahar. Pendant ce temps, Yissahar restait assis et s’occupait de la Tora. La Tora d’Yissahar existait donc grâce à Zévouloun.
Selon le Zohar Zévouloun mérite la préséance parce qu’il sortait le pain de sa bouche afin de le donner à son frère Yissahar.
Cependant, comment comprendre le sens de la bénédiction de Moshé : « Réjouis-toi Zévouloun dans ta sortie » Pourquoi Zévouloun doit-il se réjouir dans ses sorties ? Et surtout, de quelles sorties s’agit-il ?
- Hazal disent que l’étude de la Tora est un puissant bouclier contre le Yetser Ara. La Guémara Kidoushin (30b) enseigne que la Tora est comparée à un philtre de vie. Comme un père qui infligerait à son fils une sévère correction, puis soignerait ses plaies avec un baume en lui disant : « Mon fils, tant que cet onguent restera sur tes plaies, tu peux manger ce qu’il te plaît, te baigner sans crainte dans l’eau chaude aussi bien que dans l’eau froide ; mais si tu l’enlèves, tes plaies s’ouvriront. »
De la même façon, Hashem a dit au Klal Israël : « Mes fils, J’ai créé le Yetser Ara, J’ai créé la Tora comme seul antidote. Si vous étudiez la Tora, vous ne succomberez pas au mauvais penchant, mais si vous n’étudiez pas la Tora, le Yetser Hara vous dominera et il emploiera toute son habilité pour vous nuire. ».
- La Guémara Bérahot (5a) nous enseigne au nom de Rabbi Shimon Ben Lakish que celui qui étudie la Tora est protégé de multiples souffrances.
- Enfin la Tora assure une multitude de bénédictions à tout celui qui peine pour elle.
Rashi explique au début de la Parasha Bé’houkotaï (Vayikra 26 ; 3) que celui qui se fatigue dans l’étude de la Tora avec l’intention d’observer et d’accomplir ce qui y est marqué méritera de recevoir toutes les bénédictions qui sont écrites dans cette Parasha : « Si vous marchez dans Mes décrets et observez Mes commandement, Je donnerai Mes pluies en leur temps, la terre donnera sa récolte et l’arbre du champ donnera son fruit, etc. … »
Ainsi tout celui qui s’attache à Elle en l’étudiant et en la soutenant s’assure une protection permanente et verra ses entreprises réussir.
C’est là le sens de la bénédiction que Moché fait à Zévouloun : « Réjouis-toi dans tes sorties », car tu es protégé et tu réussiras dans tout ce que tu entreprends.
On peut également expliquer que le rôle de Zévouloun étant de permettre à Yissahar d’étudier la Thora sans aucun souci matériel, cela lui permet de devenir son associé à parts égales dans cette étude et il méritera, par conséquent, le même salaire que lui. Il est comparable à un grand actionnaire qui a fait de fabuleux investissements et qui en sort très heureux.
Le Midrach donne d’ailleurs l’explication suivante : « Réjouis-toi Zévouloun dans ta sortie » et pourquoi ? Car « Yissahar (est) dans tes tentes » (celles que tu lui as fournis grâce à ton argent).
On vient ici rassurer Zévouloun quant à son Olam Aba, il n’a pas à s’inquiéter sur sa part, elle est immense, comme si lui-même s’était plongé dans la Tora et était devenu un Talmid Haham.
A ce sujet la Guémara Bérahot (17a) demande : « Par quels mérites les femmes obtiennent-elles le monde futur ? La Guémara répond, pour la peine qu’elles se donnent à envoyer leurs enfants étudier la Tora et parce qu’elles engagent leur mari à fréquenter les maisons d’étude et qu’elles attendent leur retour du Beith Hamidrash ».
Certains s’étonnent sur la question que pose cette Guémara. Les femmes ont en effet de nombreuses Mitsvot qui leur rapportent beaucoup de mérites :
- Le Shabbat
- Le prélèvement de la ‘Hala
- Les lois de pureté familiale
- Toutes les Mitsvot Lo Taassé (Commandements négatifs)
- Toutes les Mitsvots Assé (commandements positifs) qui ne dépendent pas du temps, (les femmes étant exemptent des commandements positifs qui dépendent du temps).
S’il en est ainsi, comment se fait-il que la Guémara s’inquiète pour les femmes et l’acquisition de leur Monde futur ?
Dans le Zohar, Parachat Térouma, Rabbi Yossi commente le verset : « Ki Ner Mitsva Vé Thora Or » (Car la Mitsva est une bougie, la Tora est la lumière) (Michlé 6-23) ainsi :
– « La Mitsva est une bougie », car une bougie est un support sans flamme qui attend d’être allumée par la flamme que représente la Tora. À chaque Mitsva qu’un homme observe dans ce monde on lui prépare une bougie dans le monde futur pour l’éclairer.
– « La Torah est la lumière », car celui qui se plonge dans l’étude de la Tora mérite la lumière céleste (qui constitue le plaisir du monde futur), par laquelle on allume les bougies que sont les Mitsvot.
Et puisque des bougies sans flamme ne peuvent éclairer et qu’une lumière sans support ne peut se maintenir, Tora et Mitsvot deviennent donc indispensables l’un à l’autre.
L’étonnement de la Guémara réside donc dans le fait qu’il manque aux femmes un élément indispensable à l’accès au Olam Haba : l’étude de la Thora à laquelle elles ne sont pas astreintes (si ce n’est toutes les lois qui les concernent !).
La réponse de la Guémara est donc que la femme et son mari forment ensemble ce fameux duo de Zévouloun et Yissa’har, et que si chacun sait accomplir son rôle : la femme en soutenant son mari afin qu’il puisse étudier du mieux qu’il peut et le mari en fixant une étude journalière qu’il n’annulera pour rien au monde, alors tous deux auront accès à toutes les bénédictions que peut amener l’étude de la Tora dans ce monde-ci et dans le monde futur.
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