Béaalotékha 2021

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PARACHAT BÉAALOTÉKHA

Pendant quarante ans, le peuple juif erra dans le désert. La Manne tombait quotidiennement pour les nourrir. Ils avaient assez à boire, grâce au Rocher qui voyageait avec eux et dont coulait de l’eau. De plus, le camp était entouré par six côtés de Nuées de Gloire qui assuraient sa sécurité dans le désert.

Ces nuées avaient quatre buts :

  • Elles protégeaient le peuple Juif des rayons du soleil.
  • Rachi (Dévarim 8 ; 4) nous dit qu’elles nettoyaient leurs vêtements et leur donnaient l’apparence de vêtements repassés. De plus, au fur et à mesure que les enfants grandissaient, leurs vêtements grandissaient avec eux.
  • Elles les conduisaient à travers le désert : « L’Eternel marchait devant eux le jour, en une colonne de nuée, pour les diriger dans le chemin ; et la nuit, en une colonne de feu pour les éclairer, pour qu’ils marchent jour et nuit » (Chémot 13 ; 21).
  • Rachi dans notre Paracha (10 ; 34) nous apprend qu’il y avait une septième nuée qui avançait devant eux en aplatissant les montagnes, élevant les vallées et tuant les serpents et les scorpions. Il n’y avait pour eux aucune dénivellation de terrain, quelle que soit la topographie de l’endroit, ils avançaient sur un sol plat.

Les nuées protégeaient également les Juifs des guerres avec les nations hostiles. Tant qu’ils étaient enveloppés dans la protection des Nuées de Gloire, aucune nation ne pouvait les attaquer. Elles absorbaient les projectiles et les flèches des ennemis extérieurs (Rachi Chémot 19 ; 4).

Selon la Guémara Bérakhot (54b), lorsque les Béné Israël ont traversé le pays des Amoréens, ceux-ci ont cherché à les attaquer par surprise. En effet, le Klal Israël devait passer par une sorte de défilé entre les Monts de Moav et les Monts Amoréens. Il y avait beaucoup de grottes dans ces montagnes. Les ennemis s’y sont donc cachés pendant la nuit. Ils pensaient attaquer les Juifs au moment où ceux-ci s’engouffreraient entre les deux montagnes. Leur position dominante leur accorderait à coup sûr la victoire car du haut de ces montagnes il était très aisé de tirer des flèches et de jeter des projectiles sur les Béné Israël qui passeraient en bas sans se douter de rien. L’effet de surprise serait total.

Mais c’était sans compter sur le fait que le Aron marchait devant les Béné Israël et aplanissait le chemin[1]. Quand le Aron HaKodech est arrivé, les deux montagnes se sont rejointes pour ne former plus qu’une. En face de chaque grotte il y avait des proéminences qui sortaient de la montagne. Les deux montagnes se sont unies pour ne former qu’une et les saillies sont entrées dans les grottes en tuant les soldats qui s’y trouvaient. La montagne s’est alors affaissée en remplissant la vallée afin de rendre le chemin droit pour les Béné Israël. Ensuite, après leur passage, tout est entré dans l’ordre et les deux montagnes se sont séparées laissant le sang et les membres des ennemis s’écouler dans le fleuve Arnon qui coulait en bas.

Ce sont deux Métsora (lépreux) qui suivaient le Klal Israël de loin (un Métsora est Tamé, impur, et ne peut donc pas pénétrer à l’intérieur des nuées, il est obligé de sortir du camp et de suivre les nuées), qui ont remarqué le sang qui coulait le long des flancs rocheux jusque dans le fleuve. Ils ont averti les Béné Israël qui ont alors pris conscience du miracle extraordinaire que Hachem venait d’accomplir pour eux sans qu’ils ne s’en aperçoivent.

Outre le fait de montrer la direction, les nuées indiquaient quand et combien de temps le peuple camperait à chaque endroit. Quand les nuées s’arrêtaient, le peuple s’arrêtait et établissait un campement où il restait jusqu’à ce que les nuées signalent qu’il était temps de partir (9 ; 17 et suiv.). Le peuple allait se laisser guider ainsi jusqu’à son entrée en Terre d’Israël.

Le Rav Yéhezkel Levinstein (Or Yéhezkel, Emouna page 88) enseigne qu’après le don de la Torah, la toute première épreuve à laquelle Hachem soumit le peuple juif, fut de s’habituer à suivre la nuée. Il rapporte au nom du Ramban que les arrêts réguliers de la nuée causaient de nombreux désagréments aux juifs. Ils devaient parfois camper dans des lieux difficiles et pourtant, ils demeuraient sur place, même pendant de longues périodes, jusqu’à ce que la nuée s’élève. L’endroit n’était pas agréable, les ennemis rôdaient aux alentours. Mais ils sont tout de même restés là, car telle était la volonté de Hachem.

Inversement, s’ils devaient reprendre la route après un arrêt trop court, ils acceptaient de plein gré la volonté de Hachem, et ce, même si l’endroit semblait accueillant.

Cela nous apprend que dans notre existence, nous devons nous soumettre à la volonté Divine. Si un lieu ou une situation semblent mauvais ou déplaisant à nos yeux, nous devons avoir la certitude que c’est pour notre bien, car telle est la volonté du Créateur.

Et ce que Hachem considère comme mal ne saurait receler la plus petite parcelle de bien, même si nous y découvrons des aspects avantageux.

Nous devons absolument nous convaincre que ce que Hachem fait est pour notre bien et donc que toutes les situations sont « bonnes ».

On sait que les périodes de l’existence ne se ressemblent pas.

Parfois, un homme ressent en lui une grande lumière. Cela est dû au fait que Hachem l’éclaire de Sa propre lumière. À ce moment-là, l’homme mène une existence sereine, Hachem le guide tranquillement, autant spirituellement que matériellement.

En revanche, il perçoit à d’autres moments que son monde vacille, s’obscurcit entièrement et qu’il est assailli de toutes parts d’épreuves interminables, dues, soit à son Yétser Hara qui le poursuit sans cesse, soit aux vicissitudes matérielles de l’existence.

Certains se trompe et pensent que le travail accompli par l’homme et sa valeur se mesurent essentiellement lorsque Hachem l’éclaire de Sa lumière et non pas quand se côtoient la lumière et les ténèbres, et encore moins lorsque l’obscurité est totale.

Or, c’est précisément dans l’obscurité qu’on verra Hachem. Il a besoin de notre travail pendant les moments obscurs, car cela, aucun ange dans le ciel ne peut l’accomplir, et cela ne peut être effectué que par l’homme ici-bas.

Parfois, on se considère comme éloigné d’Hachem, et notre plus grand désir consiste à vouloir ressentir une émotion et une ferveur dans son service. C’est une erreur, car peut-être veut-on dans le ciel nous aider précisément dans l’obscurité.

La question est connue : Hachem a demandé à Aaron d’allumer les lumières du candélabre (8 ; 2). Hachem a-t-il besoin de nos lumières ?

On répond avec une parabole : Un roi avait un ami parmi les gens simples du peuple et il lui annonça : « Je désire manger chez toi, va et prépare-moi un repas ».

Cet ami lui prépara un lit ordinaire, un chandelier ordinaire et une table ordinaire.

Lorsque le roi arriva, ses serviteurs l’accompagnaient en portant un chandelier en or. Lorsqu’il aperçut toute cette splendeur, l’ami eu honte de présenter ses ustensiles ordinaires devant le roi et il dissimula tout ce qu’il avait préparé.

« Ne t’avais-je pas prévenu que je mangerai chez toi ? Lui dit le roi. Pourquoi ne m’as-tu rien préparé ?

– J’ai vu, lui répondit-il, toute cette splendeur qui t’accompagnait et j’ai eu honte. Alors j’ai caché tout ce que j’avais préparé, parce que ce sont de simples ustensiles.

– Au contraire, lui dit le roi, je mets de côté tous mes ustensiles et, par amour pour toi, je n’utiliserai que les tiens ! »

Certes, le roi possède autant de magnifiques objets dans son palais qui le désirent et il n’a nul besoin que son ami, qui est un homme simple, lui présente des ustensiles comme les siens, car rien ne manque au palais royal.

Cependant, une chose manque au roi, précisément ces objets ordinaires qu’un homme simple s’est fatigué à lui présenter avec ses moyens.

 

Il en est de même du service divin. Hachem n’exige pas d’un homme un amour et une crainte comme ceux que lui vouent les anges, car il en a suffisamment dans le Ciel. Son plus grand désir est que nous Le servions avec nos propres forces en surmontant notre Yétser Hara, notre jalousie et notre haine gratuite envers autrui.

Il tire satisfaction du service accompli par des êtres matériels qu’Il a créés ici-bas lorsqu’ils Lui apportent le fruit de leurs efforts personnels, même si le résultat semble bien terne.

Quand parfois, dans des moments d’obscurité, on entend une petite voix au fond de nous-mêmes qui nous dit : « Il ne convient pas à quelqu’un comme toi de servir Hachem qui est aussi grand, fort et redoutable. Patiente un peu, la lumière reviendra et tu auras alors la ferveur nécessaire pour satisfaire ton Créateur et tu Le serviras comme il se doit. »

Mais cela est faux, bien au contraire, il n’y a pas de moments plus propices et plus cher à Hachem que celui où l’homme Le sert alors qu’il se sent loin. Au contraire, un homme devrait rendre grâce pour ces périodes d’éloignement. C’est grâce à cet éloignement que l’on méritera une proximité encore plus grande si on apprend à les apprécier !

[1] Rachi Bamidbar (10 ; 34) écrit que c’est la nuée qui marchait devant les Béné Israël qui aplanissait le terrain, mais dans l’histoire rapportée par la Guémara Bérakhot (54b) c’est le Aron HaKodech qui aplanit le chemin.