PARACHAT CHEMOT
Nous sommes entrés dans la période des Chovavim (Les premières lettres en hébreu des Parachiot Chémot Vaéra Bo Béchala’h Ytro Michpatim). Quand l’année est Méoubérète (bissextile) on rajoute les deux Parachiot suivante Térouma et Tétsavé (cette période s’appelle alors Chovavim Tat)
Selon la Kabala toutes ces semaines sont propices à la Téchouva. Le terme de Chovavim fait d’ailleurs écho au verset très connu : « Chouvou Banim Chovavim. Revenez enfants rebelles » (Yirmia 3 ; 22), où Hachem demande aux Béné Israël de revenir à Lui et de faire Téchouva.
Rav Va’htfoguel rapporte au nom de Rabbi Yérou’ham l’explication suivante sur le Passouk : Ki Hinam Mézora Harachèt Bééné Kol Baal Kanaf (Mishlé 1 ; 17) (Certes, les filets paraissent déployés sans raison aux yeux de chaque oiseau).
Quand l’oiseau voit devant lui le filet étendu il s’enfui devant le piège car il sait que pour lui ce filet représente une mort certaine. Il s’enfui tant qu’il n’y a pas de nourriture dans le filet. Mais si on met un peu de nourriture dans le filet, d’un seul coup l’oiseau ne voit plus le piège. Le désir de manger est si fort que sa peur disparaît et qu’il se trompe lui-même en se disant : « Pour rien le filet est tendu »
Rabbi Yérou’ham explique que cette loi est valable pour toute la Création : la force de la tromperie (Koah Chel Ramaout). S’il a une envie, l’homme est capable de se tromper lui-même. Devant la tentation on oublie tout, même le filet tendu devant nous. Il n’y a aucune logique, c’est la force attractive cachée dans la Création.
Nous savons tout et nous comprenons tout. Nous savons qu’il y a une récompense, une punition et un monde futur. Mais nous fermons les yeux, nous faisons comme si nous ne voyons rien. La Taava du Olam Hazé est trop grande et nous oublions tout pour en profiter. Pourtant nous connaissons très bien les vraies valeurs.
On doit donc travailler sur soi pour ne pas se tromper. Rabbi Yérou’ham a dit celui qui n’est pas Lo’hem (littéralement celui qui ne fait pas la guerre à son Yétser Hara) deviendra peut-être un grand Talmid ‘Ha’ham ou un grand Tsadik mais s’il n’est pas Lo’hem il restera petit. Car il est arrivé haut, mais s’il avait été Lo’hem il serait monté encore plus haut. Il est donc petit par rapport à ce qu’il aurait pu être.
En travaillant sur soi on monte dans la Avoda, on atteint un certain niveau spirituel, une certaine Madréga. C’est alors qu’on est en danger. Car si on a réussi à atteindre quelque chose alors on se relâche et le risque de retomber est grand puisqu’on n’est plus vigilant. On pense être tranquille, on ne combat plus et c’est justement là que le Yétser Hara nous attend. On ne doit jamais se relâcher, spécialement à notre époque où les tentations sont multiples et grandes. Le Yétser Hara est partout et même sous des formes que l’on ne soupçonne pas.
Avant les juifs vivaient entre eux et les risques de contaminations étaient faibles. La haine ouverte des non-juifs était une barrière, une barrière certes douloureuse mais une barrière tout de même. A notre époque il est plus difficile de ne pas s’assimiler au monde environnant, tant au niveau des idées, de la manière de penser et de vivre que de la culture en générale. Toutes les portes nous sont ouvertes. On nous veut, on nous attire. C’est à nous de faire marche arrière, au risque de passer pour un rétrograde. C’est donc plus difficile. Le Yétser Hara nous présente un bon gâteau, c’est dur de résister.
Nous vivons une période exceptionnelle. Jamais dans l’Histoire les juifs n’ont été aussi libres de faire leur religion. Il n’y a dans le monde pratiquement aucun état officiellement antisémite avec des lois contre les juifs. On peut trouver un antisémitisme latent, déguisé mais pas officiel. La loi interdit une injure antisémite. Est-ce que cette loi est appliquée, c’est une autre chose, mais officiellement elle existe. C’est du jamais vu. De là nous voyons notre chance de vivre dans une telle époque, mais aussi notre responsabilité. On attend quelque chose de nous. Nous devons toujours nous souvenir de ce principe fondamental : Quand on donne beaucoup à quelqu’un, c’est qu’on attend beaucoup de lui.
Le ‘Hovot Halévavot (Chaar Yihoud Hamaassé Pérek 5) dit que l’ennemi N°1 de l’homme c’est le Yétser Hara. Il nous hait au plus haut point. Il le décrit comme se cachant au tréfond de notre âme, se mélangeant à notre tempérament naturel, allant même jusqu’à nous aider dans nos conseils … A la fin de cette description terrifiante des capacités notre ennemi juré, le ‘Hovot Halévavot conclu : « Mais il ne pourra pas se tenir devant toi quand tu te lèveras contre lui. »
Rav Va’htfoguel s’étonne, pourquoi, après nous avoir décrit la force de notre ennemi, le Hovot Halévavot ne nous explique-t-il pas comment le combattre ?
Il pose la même question sur la réponse divine à Kaïn quand il s’est vu refusé son Korban (Béréchit 4 ; 7), Hachem le réprimande et lui dit : « Le Yétser Hara aspire à t’atteindre mais toi, saches le dominer. » Encore une fois on ne nous dit pas comment le dominer.
Rav Va’htfoguel explique qu’en fait ‘Hazal nous ont déjà donné la réponse, c’est très simple : « Ilmalé HaKadoch Barouh Hou Ozro Eino Yahol Lo », si ce n’était qu’Hachem aide l’homme, jamais ce dernier n’aurait pu battre son Yétser Hara (Guémara Kidouchine 30b). Nous ne pouvons pas nous mesurer à lui.
Que faire alors ? Se lever et se tenir devant lui c’est tout ! Montrer une opposition et tout de suite il disparaît. L’homme reçoit du Ciel des forces inimaginables et il gagne. C’est pourquoi le ‘Hovot Halévavot ne nous a pas dit comment le combattre. Il n’y a pas de recette il suffit de se lever et de dire non. Il n’y a rien à expliquer. Si on se lève devant lui il disparaît automatiquement. C’est tellement simple que personne n’y pense. On reçoit alors des forces nouvelles insoupçonnées. On devient fort, on devient différent et on gagne.
Rav Va’htfoguel demande : Quelle a été la particularité d’Avraham ? En quoi était-il différent des autres générations qui l’ont précédé ?
On donne le Machal suivant : Un jour un homme était en chemin, il voit un bandit armé jusqu’aux dents et autours de lui plein de cadavres humains. Il comprend qu’il est le prochain sur la liste et que tout celui qui passe par ici est assassiné. Mais comme il est intelligent il observe bien la scène. Quelle est la force de ce bandit ? Il est costaud et il est bien armé mais il lui manque une chose, il n’a pas de jambes. Il ne peut pas bouger de sa place. Si c’est ainsi, comment arrive-t-il à attraper ses victimes et à les tuer ? En leur faisant très peur et en les appelant. Elles sont troublées et elles s’approchent de lui pour implorer sa pitié. Une fois qu’elles sont suffisamment proches de lui, il les tue. L’homme, qui a compris maintenant le point faible de ce bandit, décide fermement dans son cœur de ne pas avoir peur, ce bandit ne peut rien lui faire. Il se dit : « Je vais avancer dans mon chemin et ce bandit n’a qu’à crier, m’appeler, me faire des menaces c’est du vent. Si moi je ne vais pas vers lui il ne peut rien me faire. Toute ma Avoda consiste donc à bien rester sur ma route sans dévier. »
Ainsi étaient toutes les générations avant Avraham, elles sont toutes tombées dans les mains du Yétser Hara. Mais Avraham n’est pas tombé. Pourquoi ? Car il a vu que si on ne va pas vers lui le Yétser Hara n’a aucun pouvoir. Il suffit de ne pas l’écouter. On a l’impression qu’il a beaucoup de pouvoir, mais en fait, c’est faux. Il crie, il appelle, il suffit de ne pas l’écouter. Il ne pourra rien nous faire si nous n’allons pas vers lui.
La Guémara Yoma (35b) nous enseigne qu’un pauvre, un riche et un Racha arrive devant le Tribunal Céleste.
Au pauvre on demande : Pourquoi n’as-tu pas étudié la Tora ? S’il répond : Parce que j’étais pauvre et je devais chercher ma nourriture. On lui répondra : Etais-tu plus pauvre que Hillel ? On raconte sur Hillel que chaque jour il allait travailler pour gagner un demi-dinar. Il en consacrait la moitié pour nourrir sa famille et l’autre moitié il la donnait au gardien du Beit Hamidrach pour qu’il le laisse entrer.
(A cette époque on rémunérait le gardien qui s’occupait du Beit Hamidrach il recevait ainsi son salaire. Quelqu’un a fait une fois remarquer que le gardien recevait donc un quart de dinar de chaque personne qui entrait et pourtant à la fin de la journée avec les dizaines de quart de dinar qu’il avait reçu la Guémara ne nous dit pas qu’il est devenu riche. C’est dire la valeur d’un quart de dinar … et quand même Hillel s’en suffisait pour nourrir sa famille.)
Un jour il n’a pas pu gagner cette somme et le gardien ne l’a pas laissé entrer. Il grimpa alors sur le toit et l’oreille collée à une fenêtre du toit il écouta le cours des grands maîtres de la génération Chemaya et Avtalion. C’était un vendredi soir et il neigeait. La neige finit par le recouvrir. Chabbat matin Chemaya et Avtalion, se sont aperçu qu’il faisait anormalement sombre dans le Beit Hamidrach. Ils ont levé les yeux et ils ont vu un corps sur le toit. Ils sont montés et ils ont trouvé Hillel enseveli sous une épaisseur de neige de trois Amot (1m.80) ils le débarrassèrent de la neige, le lavèrent, l’enduire d’huile et le mirent devant le feu pour le réchauffer. Ils dirent : un tel homme mérite qu’on profane le Chabbat pour lui.
Au riche on demande : Pourquoi n’as-tu pas étudié la Tora ? S’il répond : Parce que j’étais riche et je devais m’occuper de mes affaires. On lui dira : Etais-tu plus riche que Rabbi Elazar Ben ‘Harsom qui a hérité de son père mille villes sur la terre et mille bateaux sur la mer ? Chaque jour il prenait un paquet de farine sur ses épaules et il partait étudier la Tora. Une fois il a été attrapé par ses propres serviteurs pour aller travailler dans ses propres biens. Ses serviteurs ne le connaissaient pas, c’est dire s’ils étaient nombreux, ils l’ont pris pour un habitant de la ville et l’ont obligé à travailler pour le maître de la ville c’est-à-dire lui. Il leur à dit : « S’il vous plaît laissez-moi aller étudier la Tora. » Ils lui répondirent : « Par la vie de Rabbi Elazar Ben ‘Harsom nous ne te laisserons pas partir. » (Le Eïn Yaakov rajoute qu’il a dû leur donner une grosse somme d’argent pour qu’ils le libèrent et le laissent aller étudier.) Comme il étudiait la Tora jour et nuit eux ne le connaissaient pas et lui non plus ne les connaissaient pas.
Au Racha on demande : Pourquoi n’as-tu pas étudié la Tora ? S’il répond : Parce que j’étais beau et j’étais occupé avec mon Yétser Hara. On lui dira : Etais-tu plus beau que Yossef Hatsadik ? On dit que la femme de Poutifar tentait chaque jour de le séduire sans succès.
Donc, Hillel accuse le pauvre, Rabbi Elazar Ben ‘Harsom accuse le riche et Yossef Hatsadik accuse le Racha.
Qu’apprenons-nous de cette Guémara ? Qu’une seule personne peut accuser le monde entier. S’il existe quelqu’un sur terre qui a pu aller contre sa nature cela est suffisant pour accuser tous les autres. Pourquoi ? Car même lui, ce n’est pas parce qu’il est plus fort que les autres qu’il a réussi à vaincre son Yétser Hara, mais parce qu’il a combattu son Yétser Hara et il a changé sa nature. A ce titre chacun d’entre nous peut faire la même chose et changer sa nature.
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