DIVRÉ TORAH SUR LA PARACHA RÉÉ

DIVRÉ TORAH SUR LA PARACHA RÉÉ

 

Dévarim (11 ; 29) : « …tu placeras la bénédiction sur le mont Guérizim et la malédiction sur le mont Eval. »

Rachi rapporte la Guémara Sotah (32a) qui explique que les Cohanim tournaient leur visage en direction du mont Guérizim et commençaient par la bénédiction : « Béni soit l’homme qui ne fera pas d’idole… ». Ensuite, ils tournaient leur visage en direction du mont Eval et commençaient la malédiction.

Il y a deux questions sur notre verset :

  • Pourquoi les bénédictions sont-elles dites en se tournant vers le Mont Guerizim et les malédictions vers le Mont Eval ? Est-ce qu’on aurait pu faire l’inverse ?
  • Existe-t-il un rapport entre ces deux montagnes et les bénédictions et les malédictions ?

Le Midrash Talpiot dit que ces deux montagnes avaient toutes les deux les mêmes conditions pour produire de la verdure. Le soleil éclairait ces deux montagnes de la même façon et toutes les deux avaient des cours d’eau qui s’écoulaient à leurs pieds.

Et malgré tout, alors que le mont Guérizim était verdoyant toute l’année, le mont Eval quant à lui restait continuellement aride et desséché, sans la moindre verdure.

Pourquoi ? Afin de nous transmettre le principe selon lequel la réussite ou l’échec, la bénédiction ou la malédiction, ne dépendent pas uniquement de conditions naturelles extérieures.

Ce sont essentiellement les propriétés profondes et intérieures de l’homme qui permettent de recevoir la bénédiction. Suivant ce que nous sommes vraiment, nous serons bénis ou non, indépendamment de notre environnement.

Ainsi, en méditant sur ce message de ces montagnes, on sera à même de comprendre que c’est l’intériorité d’une personne qui entraîne la bénédiction, et non les circonstances extérieures telles que la situation financière, familiale, environnementale ou autre.

Parfois, il peut nous arriver de penser que si notre vie était différente, si nous avions un autre travail, une autre famille, un autre environnement, nous aurions pu davantage nous investir dans la Torah et les Mitsvot.

La leçon du mont Guérizim et du mont Eval vient nous rappeler qu’il n’en est rien.

La réponse est chez nous, au fond de nous-même, dans notre manière d’être. L’essentiel de la réussite dépend de notre intériorité. C’est en développant sa détermination et sa volonté, et en raffinant ses traits de caractère, qu’on réussira et qu’on sera béni, même avec des conditions extérieures très défavorables.

Et à contrario, même les meilleures conditions du monde n’accorderont pas la réussite à ceux qui ne construisent pas leur intériorité.

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Dévarim (14 ; 8) : « Et le cochon, car il a le sabot fendu mais il ne rumine pas, il est impur pour vous… »

On peut s’interroger sur l’ordre de ce verset, en effet, la raison pour laquelle le cochon n’est pas cachère, ce n’est pas parce qu’il a les sabots fendus (ce qui est signe de cacherout), mais c’est parce qu’il ne rumine pas.

On se serait donc plutôt attendu à ce que la Torah mentionne le fait qu’il ne rumine pas avant le fait qu’il a des sabots fendus, car c’est parce qu’il ne rumine pas qu’il est interdit.

Le Kli Yakar rapporte que le cochon est le symbole de l’hypocrisie.

Selon la formule de nos Sages : Quand il est au repos il met ses sabots en avant comme pour dire : « Regardez, je suis cachère. » Contrairement à la vache, animal cachère, qui replie ses pattes avant sous elle quand elle se repose.

Par cela, le cochon symbolise ce défaut qui consiste à tromper les autres et se faire passer pour un homme pieux alors qu’en réalité il n’en est rien.

Mais le plus grave, c’est qu’il finit par se tromper lui-même et être persuadé de sa grande piété. Or, la condition de base pour corriger ses défauts c’est d’être honnête avec soi-même et reconnaître la vérité de ce que l’on est.

Comment un homme qui se croit parfait pourra-t-il accepter de voir ses failles et les corriger ?

Ainsi, ce n’est pas tant le fait que le cochon ne rumine pas qui soit le plus problématique. Car avoir de mauvais traits de caractère n’est pas en soi si embêtant tant qu’on est prêt à les corriger.

Mais ce qui compromet le plus le repentir et la réparation, c’est de se voir comme un être parfait, d’imaginer n’avoir rien à arranger, c’est-à- dire se mentir à soi-même.

Ce sont ses sabots fendus qu’il présente en avant pour couvrir ses défauts et les ignorer, faisant croire à tous qu’il est cachère, qui rendent si difficile le repentir, la remise en question et la reconnaissance de ses fautes.

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Dévarim (15 ; 8) : « Mais ouvrir, tu ouvriras ta main pour lui et prêter, tu lui prêteras suffisamment pour son besoin selon ce qui lui manquera. »

Rachi explique qu’on doit donner même plusieurs fois. Et s’il n’accepte pas un don on devra lui faire un prêt. S’il était riche et qu’il s’est appauvri, on devra lui donner comme ce qu’il possédait auparavant : un cheval pour chevaucher et un serviteur pour courir devant lui. On doit également lui trouver une épouse s’il n’en a pas.

Le Gaon de Vilna précise que la Torah évoque ainsi allusivement l’ordre exact à appliquer dans le don de la Tsédaka.

Si l’homme plie ses doigts, ils ont tous l’air égaux, tandis que quand sa main est ouverte, on voit bien que ce n’est pas le cas, certains doigts sont plus longs que d’autres.

Or, le verset précise qu’il faut fournir aux nécessiteux, en raison de ses besoins, de ce qui peut lui manquer, selon Rachi, même un cheval en guise de monture et un serviteur pour courir devant lui.

En d’autres termes, il faut donner à chacun selon son rang et sa valeur, ce qui nécessite un examen approfondi pour distinguer les besoins spécifiques des uns et des autres.

C’est pourquoi la Torah précise : « ouvrir, tu ouvriras ta main », cela sous-entend qu’il ne faut pas fermer sa main, car dans ce cas, les doigts ont tous l’air de même longueur. Tu ne verras pas le problème qu’il rencontre.

Au contraire, « ouvrir, tu ouvriras ta main », et ainsi tu constateras que les doigts ne sont pas de longueur identique, de même tu discerneras les différences de besoins nécessaires entres les pauvres.

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