Pourim, Guilouï Hachem Béto’h Hatéva
Rav Pinkous écrit (ז״י ףד םירופ) qu’à Pourim nous accomplissons quatre Mitsvot : la lecture de la Méguila, Michloa’h Manot, Matanot Laévyonim et le repas de Pourim. Nous allons essayer d’expliquer ces Mitsvot.
Pourim tourne autour de la notion de « Vénaafo’h Hou », tout est à l’envers, tout est inversé. A Pourim, les valeurs sur lesquelles nous basons notre vision du monde sont inversées.
Sur le Passouk : « Itsrak est sorti dans les champs avant le soir, Rivka à levé ses yeux et elle a vu Itsrak elle est alors tombée du chameau. » Le Midrach nous rapporte (ו״ט ס הבר תישארב) (ב ׳ס רומא אמוחנת, ט״ק זמר תישארב ש״לי) Itsrak est allé se promener dans le Gan Éden et quand Rivka a levé ses yeux elle a vu qu’il sortait du Gan Éden.
Pourquoi est-elle tombée du chameau ?
Car celui qui sort du Gan Éden sort à l’envers, les pieds vers le haut et la tête vers le bas. Itsrak a accompli « Vénaafo’h Hou », comme tous ceux qui sortent du Gan Éden les pieds vers le haut et leur tête vers le bas.
D’ailleurs le nom même d’Its’hak sous-entend cela, Its’hak vient du mot « Sé’hok » qui signifie le rire. Que signifie ce Midrach ?
Nous avons un autre Midrach (ח״י ה יתבר הכיא) qui nous raconte qu’une fois, Raban Gamliel, Rabbi Eléazar Ben Azaria, Rabbi Yéhochoua et Rabbi Akiva sont entrés à Rome et ils ont entendu le brouhaha de la population romaine jusqu’à 120 Mil. Ils ont commencé à pleurer et Rabbi Akiva souriait. Alors les sages se sont adressés à Rabbi Akiva :
– Pourquoi souris-tu alors que nous pleurons ? »
– Et vous, pourquoi pleurez-vous ? »
– Comment ne pas pleurer alors que les nations idolâtres sont tranquillement installées en paix et que la maison de notre D.ieu a été brûlée et est maintenant devenue un repère pour les animaux des champs ?
– C’est justement la raison pour laquelle je souris, s’il en est ainsi de ceux qui s’opposent à la volonté d’Hachem, à plus forte raison combien doit être grande la récompense de ceux qui font la volonté d’Hachem.
Le Midrach continue en disant qu’une autre fois ces mêmes Tanaïm montaient à Yérouchalaïm quand ils sont arrivés au Har Habaït ils ont vu un renard qui sortait de l’endroit où se trouvait auparavant le Kodèch Hakodachim. Ils ont commencé à pleurer et Rabbi Akiva a souri. Ils lui ont dit :
– Tu nous étonneras toujours, nous pleurons et toi tu souris ?
– Et vous, pourquoi pleurez-vous ?
– Comment ne pas pleurer alors qu’un endroit au sujet duquel il est dit : toute personne autre qu’un Cohen qui s’y approche doit mourir, est à présent la demeure des renards ?
– C’est justement la raison pour laquelle je souris.
Rabbi Akiva leur a expliqué que c’est justement de la présence du renard dans un lieu si Kadoch qu’il tire toute sa raison de sourire. Ils lui ont alors dit : « Akiva, tu nous as consolés. »
Nous retrouvons la même idée quand Rabbi Eliézer est tombé malade, tout le monde pleurait et Rabbi Akiva souriait (א״ע א״ק ןירהנס).
Dans trois endroits nous trouvons donc Rabbi Akiva qui sourit. Comment expliquer ce rire de Rabbi Akiva ?
Le point central du jour de Pourim est le lien, l’attachement entre Hachem et le Klal Israël. Cependant, il existe une grande barrière entre les deux qui gêne cette relation, c’est le Téva, la Nature.
Essayons de donner un exemple qui nous montrera cette évidence. Devant le nez de chaque personne se trouve un cadeau extraordinaire, c’est l’air qu’il respire. Sans air un homme meurt. Si c’est ainsi, pourquoi l’homme ne s’enthousiasme-t-il pas plus de ce cadeau magnifique ? Pourtant l’homme devrait crier à longueur de journée : « Merci Hachem ! »
La raison en est simple, car tout le monde a de l’oxygène et pas seulement moi. Hachem donne de l’oxygène au monde entier et moi parmi les autres j’en reçois aussi. De même quand l’homme s’aperçoit le matin au petit déjeuner qu’il a du pain sur la table il n’est pas spécialement étonné car tout le monde en a.
Prenons un exemple, un homme entre dans une maison et voit sur la table une assiette remplie de gâteaux. Il peut expliquer la présence de cette assiette de deux manières. Il est possible que le propriétaire ait laissé sur la table 20 gâteaux pour 20 personnes et même cet invité est compris dans ces 20 personnes et donc il a aussi droit à un gâteau. Mais peut-être aussi qu’en fait il n’y a qu’un seul un invité, et un seul gâteau pour cet invité.
Si c’est ainsi pourquoi y a-t-il 19 autres gâteaux ? En fait on a ajouté les autres gâteaux pour ne pas que cet invité se sente mal à l’aise et qu’il ait l’impression de prendre la nourriture de la bouche du propriétaire. Afin de montrer qu’il y a de l’abondance on met beaucoup de gâteaux dans l’assiette, mais en fait, il est seul et un seul gâteau lui est réservé.
C’est la même chose avec l’oxygène quand un homme respire de l’air. En fait, Hachem a créé spécialement pour lui une certaine quantité d’air pour qu’il puisse respirer et vivre. Mais pour une certaine raison Hachem ne veut pas qu’on sache que c’est Lui qui donne de l’oxygène à l’homme. Il cherche donc à cacher cette extraordinaire donation. Pour ce faire Il ne va pas donner à cet homme juste la quantité nécessaire pour respirer mais Il a créé encore des centaines de milliards de quantités d’oxygène tout autour de lui.
Mais en vérité l’homme doit savoir que ce cadeau ne concerne que lui. Il y a sur terre une quantité impressionnante d’oxygène et je peux même parfois penser qu’il y en a « de trop ». La vérité est qu’il n’y en a qu’une seule (quantité) pour moi, et pour cacher ce miracle on en a créé plein autour. Mais en fait toutes les autres quantités d’oxygène n’ont aucune raison d’être si ce n’est venir cacher la quantité qui m’est réservée.
Prenons un autre exemple, un homme entre dans un magasin pour acheter 1 litre de Coca. Au moment où il va chercher dans les rayons son litre de Coca que pense-t-il ? Comment et pourquoi, selon lui, ces centaines de litres de Coca sont-ils arrivés dans ce magasin ? C’est sûr qu’il pense que Hachem a mis dans ce magasin 500 litres de Coca pour tout le quartier. Il y a du Coca pour chaque habitant du quartier et aussi pour lui avec eux.
C’est faux ! La vérité c’est que Hachem a mis dans ce magasin 1 litre de Coca bien précis pour une famille bien précise, et ce, avec amour. Et dans ce magasin il ne devrait y avoir qu’un seul litre de Coca pour uniquement cette famille. Mais, puisque nous vivons dans un monde où règne l’obscurité, Hachem a besoin de cacher ses actions et donc il a mis aussi autour de ce litre de Coca réservé à cette famille 499 autres litres de Coca afin de cacher ce miracle.
C’est l’essence même du jour de Pourim. À Pourim ont nous dévoile la vérité : « Vénaafo’h Hou » tout est à l’envers.
Notre regard sur la Nature est faussé. Nous devons inverser la manière que nous avons d’appréhender la Nature. Si cet homme qui est entré dans le magasin pense encore aujourd’hui qu’il y a là-bas 500 litres de Coca, à Pourim nous apprenons que cela est faux. Il n’y a dans ce magasin qu’un seul litre de Coca que Hachem a préparé pour moi avec amour. Il n’y a rien d’autre dans ce magasin. Le reste, c’est juste pour cacher ce Ness extraordinaire.
Le jour de Pourim nous avons quatre Mitsvot. La première Mitsva est la lecture de la Méguila. Le mot « Méguila » vient de « Mégalé », c’est-à-dire dévoilement.
À chaque fête de la Torah nous apprenons ce que signifie être juif. Ce que signifient les Mitsvot. Nous montons au-dessus du Téva. Mais la fête de Pourim est différente. Elle nous apprend à délimiter cette réalité qui s’appelle Nature. Elle dévoile le Téva et nous apprend qu’en vérité au fond de chaque chose « naturelle » se trouve un lien d’amour entre Hachem et ses créatures. C’est autour de ce point central que tourne toute l’histoire de la Méguila.
Par exemple, on nous raconte : « Quand le roi A’hachvéroch s’est installé sur son trône royal qui était à Chouchan Habira». Pourquoi a-t-il choisi d’installer son trône royal dans cette ville ? Pourtant les autres rois qui l’ont précédé habitaient à Bavel ?
En fait, A’hachvéroch rêvait de s’asseoir sur le trône de Chélomo Hamélè’h. Mais il savait que si il essayait d’y monter les animaux qui y étaient représentés l’attaqueraient. C’est pourquoi il a décidé de se faire construire une réplique du trône de Chélomo Hamélè’h. Il a donc demandé à des ouvriers spécialisés de lui réaliser ce chef-d’oeuvre. Une fois fini ce trône était tellement lourd qu’il était indéplaçable. On ne pouvait pas l’emporter à Bavel. A’hachvéroch a donc été obligé de quitter la capitale et de s’installer à Chouchan Habira.
Pourquoi Hachem a-t-il fait cela ? Car Mordé’haï Hatsadik vivait à Chouchan ! Ce n’était pas à lui d’aller vers le roi mais c’était au roi de venir dans la ville du Tsadik. Dès le début de la Méguila, dès les premiers mots, nous apprenons que le monde entier tourne autour de Mordé’haï. C’est pourquoi elle s’appelle « Méguila » elle nous dévoile la vraie réalité.
De la même manière dans toute la Méguila on ne mentionne pas le nom d’Hachem. Car si le nom d’Hachem y était écrit de manière explicite, on sortirait du cadre naturel pour entrer dans une dimension surnaturelle, au-dessus de la Nature. Et ce sujet n’a plus rien à voir avec Pourim, il est déjà en rapport avec Péssa’h. Mais Pourim nous dévoile que dans chaque chose naturelle, qui nous semble si obscure, si dénuée de spirituel, se cache un immense amour. De nouveau : « Vénaafo’h Hou. »
Ou voit-on plus d’amour à Pourim ou à Péssa’h ? À Péssa’h, Hachem nous élève au-dessus du monde, au-dessus de la nature. Mais à Pourim Hachem se dévoile à l’intérieur du Téva.
Le Midrach rapporte qu’au moment où Moché devait quitter ce monde, Hachem a appelé la Néchama qui était dans le corps de Moché et Il lui a dit :
– Ma fille cela fait 120 ans que Je t’ai placée dans le corps de Moché, il est arrivé le moment de sortir, sors sans tarder.
– Je ne veux pas sortir !
– Sors sans tarder et Je te ferai monter dans les cieux et Je t’installerai sous Mon Trône céleste. – Dans le corps de Moché il y a plus de Kédoucha, s’il-Te -plaît laisse-moi dans le corps de Moché.
C’est extraordinaire ! La Néchama préfère rester dans le corps de Moché plutôt que d’être sous le Trône céleste car dans ce corps on ressent plus la présence d’Hachem.
Ce n’est qu’ici-bas, dans ce monde du Téva, que l’on peut être proche d’Hachem et le découvrir dans tous les points de la Nature. Même les anges sont conscients de cela, eux ils connaissent la vérité. Mais les êtres humains ne connaissent pas la vérité. Nous sommes tous avec « les pieds en bas ».
D’où vient l’homme ? De la terre. Vers où aspire-t-il ? Vers le ciel. Il a donc les pieds au sol et la tête dirigée vers le ciel.
Mais pour Itsrak c’était exactement le contraire et d’ailleurs, Rivka l’a vu sortir du Gan Éden les pieds en haut et la tête en bas. Il sortait du ciel, sa tête se dirigeait vers la terre c’est-à-dire que son but était de trouver Hachem sur terre dans ce monde-ci. C’est là tout le secret du rire d’Itsrak. (son nom a pour racine le rire) c’est-à-dire qu’il rit du regard qu’on les hommes du monde. Car tous les hommes pensent de façon tordue, ils croient tous qu’Hachem est en haut, mais Itsrak sait qu’Hachem est ici en bas sur terre et qu’à travers chaque respiration on peut trouver Hachem.
Et c’est aussi pour la même raison que Rabbi Akiva a ri. Quand ses amis lui ont demandé : «maintenant nous sommes dans une obscurité trop profonde nous ne pouvons plus remarquer la providence divine », il leur a alors répondu qu’au contraire, si vous réfléchissez bien, si vous cherchez bien, alors, à l’intérieur même de cette obscurité vous trouverez l’amour d’Hachem pour son peuple.
En vérité, c’est aussi la manière dont chacun d’entre nous doit regarder la Nature. Hachem cherche à se cacher dans la Nature. C’est pourquoi il a donné de l’oxygène à 500 autres personnes autour de moi, mais en fait, la vérité c’est que chacune d’entre elles doit ressentir cela comme un don, un cadeau qui était spécialement pour lui.
Cette idée se retrouve dans le nom même de cette fête, Pourim, « Pourim Al Chem Hapour », dans le nom même de Pourim se retrouve la racine « Pour », tirage au sort. C’est avec un tirage au sort que Haman a décidé du jour de l’extermination des juifs.
Si on réfléchit, quoi de plus naturel qu’un tirage au sort, c’est la nature par excellence car si je place 10 morceaux de papier dans une boîte avec un nom sur chaque morceau de papier et que je tire « au hasard », obligatoirement, c’est une des lois de la nature, il va en sortir un.
Comment penser que celui qui va sortir c’est Hachem qui a voulu qu’il sorte ? Si j’en mets 10 et que j’en prends un, obligatoirement, il y en a un qui sort. Et donc devant un tirage au sort il est très facile de se tromper et de penser que cela est le hasard puisque de toute manière il y en a un qui doit sortir.
Cependant, au contraire, nous voyons dans plusieurs endroits de la Torah que le tirage au sort est l’expression même de la volonté divine sur terre.
Par exemple :
- La terre d’Israël a été partagée entre les Chévatim grâce au tirage au sort, car sinon comment arriver à la partager ? Celui-là va vouloir habiter près de la mer, l’autre à la montagne et un troisième dans la plaine.
- De même pour les deux boucs de Yom Kippour, un pour Hachem et l’autre pour ‘Azazel, le Cohen ne peut pas lui-même décider lequel va être pour Hachem et lequel sera pour ‘Azazel ce n’est que Hachem qui peut le décider c’est pourquoi on a besoin du tirage au sort.
- On retrouve encore cette idée dans le livre de Yéhochoua où l’on raconte que les Béné Israël on pris du ‘Hérèm (l’anathème). Yéhochoua a fait un tirage au sort afin de découvrir le coupable. Le tirage au sort est tombé sur A’han. L’une des réclamations qu’avait A’han contre le tirage au sort c’était que justement, puisque tous les noms des Béné Israël font partie du tirage au sort, obligatoirement l’un d’eux doit sortir. Le fait donc, que son nom à lui, ait été tiré au sort n’est pas une preuve que c’est lui le coupable. Si par exemple on avait mis uniquement le nom de Yéhochoua et du Cohen Gadol dans la boîte, un des deux obligatoirement serait sorti, cela ne veut pas dire que c’est lui le coupable. C’est pourquoi Yéhochoua a besoin de mettre en garde A’han afin qu’il avoue sa faute. Car justement le tirage au sort n’est pas un « hasard » mais bien la manière qu’à Hachem de se faire entendre dans ce monde.
C’est ce que signifie le mot Pourim et c’est la première Mitsva de Pourim, la lecture de la Méguila qui nous dévoile le sens du monde. La fête de Pourim ne nous dévoile pas seulement le grand amour qui s’est révélé au moment du danger mais aussi toute la façon dont le monde tourne. Ce à quoi chacun d’entre nous doit penser quand il boit un verre d’eau et qu’il dit la Béra’ha Chéhakol.
À travers la Méguila nous nous sentons beaucoup plus proches d’Hachem car à présent nous avons appris à le rencontrer derrière chaque événement de la vie courante, de la Nature. Pourim c’est la Nature. C’est une histoire naturelle qui devient surnaturelle. Ce sont en fait deux histoires superposées celle que l’on voit se dérouler et celle qui est dessous, celle qui est dirigée par Hachem mais qu’on ne voit pas. Mais cela n’est pas vrai seulement pour la Méguila c’est vrai aussi pour chaque événement de la vie. D’un seul coup nous nous rendons compte que le monde fonctionne selon cette règle.
‘Hazal nous enseignent qu’au moment où on a un réveil vers Hachem on doit transformer ce réveil en quelque chose de concret. C’est pourquoi après la lecture de la Méguila nous accomplissons trois autres Mitsvot dont la plus intense sera le repas de Pourim.
L’une des expressions de l’amour est le cadeau. Faire un cadeau à l’autre c’est lui montré son affection. Cependant, il existe deux sortes de cadeaux :
- La première c’est quand, par exemple, je vois que mon ami a besoin d’un crayon si je lui achète le crayon et lui en fais cadeau, cela va renforcer de manière forte les liens qui nous unissent. Mais en fait le but de ce cadeau est surtout de combler un manque de la part de celui qui reçoit.
- La deuxième catégorie c’est donner un cadeau à quelqu’un qui n’est pas en manque, cette sorte de cadeau est là uniquement pour renforcer l’amitié. Par exemple, quand j’offre des fleurs à quelqu’un ce n’est pas parce qu’il lui en manque mais simplement pour concrétiser l’affection que je lui porte.
Les Mitsvot de Matanot Laévyonim et Michloa’h Manot représentent ces deux genres de cadeaux.
- Matanot Laévyonim s’accomplit quand il manque quelque chose chez celui qui reçoit et mon cadeau cherche à combler ce manque.
- Mais Michloa’h Manot ne vient pas pour combler un manque on peut offrir un Michloa’h Manot même à un homme très riche. Cette Mitsva vient uniquement resserrer les liens d’amitié entre les gens.
Maintenant nous comprenons pourquoi ces deux Mitsvot s’accomplissent de façons différentes. Matanot Laévyonim se donne à deux pauvres et Michloa’h Manot se donne à une seule personne.
Si on donne des cadeaux à beaucoup de gens, automatiquement quelque part on abîme la notion d’amour. L’amour par définition se veut égoïste, restrictif, réservé à un seul être. Donc pour la Mitsva de Michloa’h Manot je ne peux donner de cadeau qu’à une seule personne car cette Mitsva est venue afin de réchauffer l’amitié entre les personnes. Je ne peux donc donner qu’à un seul ami car l’amour est unique et donc l’amitié est aussi unique.
Mais Matanot Laévyonim vient pour combler un manque chez celui qui reçoit, et donc pour accomplir cette Mitsva il est préférable de donner à plusieurs personnes afin de combler plusieurs manques.
De même dans le ‘Héssed qu’Hachem accomplit envers nous, nous pouvons différencier le ‘Héssed qui vient combler un manque et celui qui vient concrétiser l’expression d’un amour.
Par exemple, les habits qu’un homme porte sont un cadeau d’Hachem pour combler le manque. (Malbich ‘Aroumim) mais sa cravate n’est qu’une preuve d’amour car de toute façon elle ne lui manque pas, même sans elle il est habillé. Si l’on veut on pourrait dire que la chemise c’est Matanot Laévyonim et que la cravate c’est Michloa’h Manot.
C’est pourquoi nous n’accomplissons ces deux Mitsvot qu’après la lecture de la Méguila. Car comme nous l’avons dit, la lecture de la Méguila nous enseigne la marche du monde et l’affection que Hachem nous porte. Cet amour qui est né après la lecture de la Méguila réveille en nous le besoin de donner. Si nous l’avions pu, nous aurions donné ces cadeaux à Hachem. Mais puisque cela est impossible, nous sommes alors obligés de concrétiser cet amour avec les enfants d’Hachem, ce sont les cadeaux que nous donnerons « Ich Lérééou ».
La dernière Mitsva est le repas de Pourim. En principe, par nature, quand un homme a peur de manquer de pain pour le lendemain il achète aujourd’hui deux pains. On peut mettre de côté aujourd’hui du pain pour demain. Mais il y a une chose qu’on ne peut pas mettre de côté, c’est la vie ! On ne peut pas mettre de côté maintenant l’instant suivant.
Le pain qui est posé sur la table j’ai le choix de le manger tout de suite ou de le garder pour plus tard, mais la vie que je vis dans l’instant présent, dans la minute présente n’a aucun rapport avec la vie que je vivrai dans quelques instants. Je ne peux pas cumuler ces deux périodes. Ce que je vis maintenant dans la minute présente je ne le vivrai plus après. Il m’est totalement impossible d’associer deux instants de ma vie.
De même, si l’on fait à quelqu’un une opération du cœur et qu’il faille arrêter le travail du cœur pour les besoins de l’opération ; on n’arrête pas la vie mais uniquement le cœur. C’est-à-dire qu’il faut obligatoirement que la personne opérée continue de vivre même si pour quelques instants on arrête son cœur. Il est totalement impossible de mourir pour un quart d’heure et ensuite de recommencer à vivre car la vie nous est donnée par Hachem à chaque instant.
Quand on se lève le matin on dit : «Modé Ani ». Mais à quel moment ressentons-nous mieux la vie qu’Hachem nous donne ? Au moment du repas ! Quand on arrive à la maison affamé et fatigué, dès qu’on commence à manger on se sent mieux. La nourriture c’est le lien direct qui relie l’homme à son créateur Lui-même.
Il y a une règle que dans toute chose existe une chose et son contraire. Paradoxalement nous pouvons remarquer que c’est justement au moment où l’homme commence à manger qu’il oublie Hachem. Il n’y a qu’à regarder la façon dont il fait les Béra’hot au début et à la fin du repas. Comme le dit le Passouk (ו״ט בל םירבד) : « Yéchouroun s’engraisse et se révolte. » Il mange beaucoup et alors il se révolte. Et c’est là le signe qui prouve que spécialement la nourriture est le point de liaison entre l’homme et Hachem. C’est la raison pour laquelle ‘Hazal ont institué la Mitsva du repas de Pourim qui va concrétiser la vie que nous avons reçue d’Hachem.
La Mitsva de Sim’ha à Pourim est différente de la Sim’ha des autres fêtes. En effet, dans chaque fête on doit se réjouir avec Hachem. Mais à Pourim nous devons nous réjouir pour nous réjouir. C’est là le secret de Pourim, remercier Hachem sur la Nature, sur la vie elle-même. Nous traduisons ce remerciement par la joie que nous exprimons le jour de Pourim. Elle n’a pas de support matériel à travers une Mitsva spéciale à la fête, comme par exemple à Soukot où l’on prend le Etrog et on se réjouit avec lui ; à Pourim c’est la joie pour la joie.
Tout le but de Pourim c’est de dévoiler Hachem parmi nous, à travers la joie, à travers la nourriture ou la boisson. Savoir que si je suis vivant, si je mange, si je bois, si je saute, si je me réjouis, tout cela vient d’Hachem. Nous devons ressentir que toute notre vie vient d’Hachem. Nous devons travailler afin de trouver Hachem dans chaque bouchée de pain. C’est pourquoi le repas de Pourim ne peut être fait qu’après la lecture de la Méguila. Car la Méguila vient nous enseigner l’essence même de ce jour, c’est-à-dire trouver Hachem derrière la Nature. Nous nous rapprochons d’Hachem au point d’enlever toute barrière entre Lui et nous. La Nature n’existe plus. Nous parlons directement avec Hachem.
Le jour de Pourim est un jour extraordinaire. Les Cieux s’ouvrent car Hachem à retrouvé son fils unique après avoir désespéré de lui.
Le Ari Zal insiste sur le fait qu’on doit savoir que ce qui s’est passé à l’époque du premier Pourim revient vers nous chaque année et c’est là l’essentiel du Ness. Le ‘Hessed qu’il y a eu à ce moment-là est énorme, même à Matan Torah il n’y en a pas eu autant. Car à Pourim les juifs ont accepté la Torah d’eux-mêmes, avec un cœur ouvert vers Hachem. Et c’est cette capacité de trouver Hachem et de s’ouvrir à lui qui revient chaque année. C’est là l’enseignement de la Méguila.
Un juif peut prendre un simple verre d’eau et y faire entrer un attachement à Hachem qui sera plus grand que des milliards d’années dans le Olam Haba. Nous sommes dans le monde de la Dévékout, celui où nous pouvons trouver Hachem et nous attacher à Lui.
Nous devons réfléchir au fait que chaque respiration est un cadeau personnel d’Hachem et qu’est-ce que cela peut bien nous faire si ce cadeau a été donné aussi à des millions d’autres personnes ?
À chaque respiration je dois louer Hachem. La seule chose à laquelle je dois penser c’est que : « Hachem a préparé pour moi un morceau d’oxygène. » Toute l’obscurité que l’on peut voir dans ce monde est en fait générée par Hachem qui se cache derrière. C’est la raison pour laquelle Its’hak a ri. Et c’est la grande révélation de ce jour de Pourim qui devra accompagner mes réflexions sur la façon de comprendre et de gérer ma vie dans cette fin d’année (Pourim est au mois de Adar, le dernier mois de l’année) et dans cette nouvelle année qui commencera avec le mois de Nissan.
